Sécurité routière : les 100 ans du code de la route, une histoire entre critiques et réticences

Présent dans le quotidien de dizaines de millions de Français, il est l’objet de toutes les entorses et la cible de toutes les critiques. Le code de la route s’apprête à fêter son 100e anniversaire mais reste toujours aussi contesté.

Les problématiques autour de la cohabitation des différents usagers de la route, remises au goût du jour avec l’afflux des nouveaux cyclistes consécutif à la pandémie de Covid-19, sont aussi vieilles que la circulation elle-même.

« Il y a toujours eu des règles avec l’objectif d’organiser un partage de la route qui permette à chacun de circuler en toute sécurité », explique Marie Gautier-Melleray, la déléguée interministérielle à la Sécurité routière. Elle cite en exemple une « ordonnance royale de 1725 qui impose une plaque d’identification sur les carrosses pour pouvoir retrouver leurs chauffeurs quand ils font l’objet de plaintes » quant à leur conduite.

Près de deux siècles plus tard, c’est pour mettre de l’ordre dans la flotte française croissante de véhicules automobiles – 350 en 1895, 53 000 en 1910 et 333 000 en 1920 – et de bicyclettes, qu’est promulgué, le 27 mai 1921, le « décret concernant la réglementation de l’usage des voies ouvertes à la circulation publique ».

Considéré comme le premier code de la route, ce texte vise à rassembler et surtout harmoniser toutes les règles déjà édictées.

Vitesse limitée

Mais ce code de la route originel, qui impose déjà la priorité à droite et le dépassement par la gauche, rencontre l’opposition « des constructeurs automobiles et des premiers groupes d’automobilistes, qui voulaient empêcher les pouvoirs publics de légiférer », rappelle la chercheuse Anne Kletzlen. Ils refusent notamment toute limitation de la vitesse.

Ces premières associations de conducteurs obtiennent alors gain de cause, puisque le code de 1921 abroge les limitations de vitesse imposées par un décret de 1899. Chaque pilote est simplement prié de rester « maître de son véhicule ».

En 2018, les « héritiers » de ces réfractaires se retrouveront pour batailler contre l’abaissement à 80 km/h de la vitesse maximale sur le réseau secondaire.

Ceinture, points et radars

L’obligation du port de la ceinture de sécurité à l’avant (1973) a elle aussi été vivement contestée, l’homme de lettres et artiste lyrique Jérôme Spycket allant jusqu’à publier un pamphlet intitulé « La ceinture qui tue ».

L’instauration du permis à points, en 1992, a elle déclenché l’ire des taxis et transporteurs routiers. Ces derniers ont dressé des barrages pendant une semaine, parfois levés par une intervention de l’armée. En 2003, la mise en service des radars automatiques a suscité celle, égale, des automobilistes et motards.

Mobilité et liberté

Ainsi, toutes les mesures fortes prises pour faire baisser la mortalité routière, qui a atteint un pic en 1972 (18 034 morts contre 3 244 en 2019), ont fait l’objet de résistances, considérées comme inefficaces, injustes ou liberticides.

« Ça tient aussi un peu à la nature humaine : l’homme a toujours cherché à étendre son périmètre par la mobilité, à vélo, en voiture, à moto, aujourd’hui avec les trottinettes électriques », développe Anne Lavaud, déléguée générale de la Prévention routière. « À partir du moment où on touche à cette mobilité, les humains ont l’impression qu’on réduit leur liberté ».

Source : sudouest.fr